Haïti, l’île martyre, chapitre 3…Démon-cratie

© Olivier Laban-Mattei- Polaris, novembre 2010

The presidential election in Haiti takes a bad way with fraud suspicions and troubles from some supporters in polling stations./ A woman vote for the next haitian president, 28 november 2010, in a polling station in Port-au-Prince, while people hide and flee about 200 presumed Martelly’s supporters destroying the ballot boxes

1804 Haïti devient la première colonie noire à accéder pleinement à l’indépendance. La république est instaurée…mais la démocratie n’a jamais été réellement pratiquée. L’histoire politique d’Haïti est un séisme permanent… république sous influence, dictature sous influence, peuple terrorisé par les milices et la violence. Ravagé par l’épidémie de choléra, noyé dans la rumeur, dans la corruption généralisée, la violence, la démagogie,  le peuple est instrumentalisé et désemparé. Avec près de 70% de taux d’analphabétisme, la culture démocratique semble réduite à sa portion congrue.  Olivier Laban-Mattei nous montre la mobilisation et la fragilité du peuple haïtien, une conscience politique (manipulée ou pas) qui reste vivace même dans le bidonville de Cité Soleil, l’un des plus dangereux d’Haïti. Il témoigne aussi de ce que les médias appellent pudiquement « troubles » électoraux qui aggravent le chaos général du pays. Le cliché interpelle en plusieurs temps: au premier regard tout semble  quasi normal au centre une table, des urnes, un directeur de bureau digne et sérieux, une femme s’approche pour voter…le flou appuie la marche de la démocratie…élection « normale » ?…rien de tout cela. Le flou sert une situation qui dérape: la femme a peur, elle court, sous la table du bureau un homme se protège, au fond un mouvement de foule montre la panique générale…élection « agitée ». Plus qu’à des fraudes ( ces urnes transparentes ne semblent pas très hermétiques), plus qu’à des intimidations ou  des bagarres nous assistons sur ces photos au viol de la démocratie par des partisans, nous assistons, impuissants, au chaos. Dans l’ensemble de sa série sur les élections, Olivier Laban Mattéi constate que ce sont les supporters du candidat du changement Martelly  et ceux de Jude Célestin, candidat du président (tout aussi violents) qui sont à l’origine des agitations.

L’image de cette femme qui court pour fuir les agresseurs,  son  bulletin de vote à la main ne peut révolter, ne peut qu’être érigée en symbole d’un peuple en état de détresse totale, en symbole d’une démocratie  fragile, terrifiée mais qui veut vivre envers et contre tout…et tous…Le contraste est violent entre l’immense mobilisation humanitaire et financière post-séisme et la situation actuelle toujours aussi chaotique.

Laetitia Canal-Cologni

© Olivier Laban-Mattei- Polaris, novembre 2010

The presidential election in Haiti takes a bad way with fraud suspicions and troubles from some supporters in polling stations./// Picutre taken on 28 november 2010, during the vote for the presidential election, at the national school of Port-au-Prince, of ballots on the ground after presumed Celestin’s supporters destroyed all the ballot boxes.

*Chronologie sommaire de l’histoire haïtienne

 Colonie espagnole puis française à partir du XVIème siècle. 1791 révoltes des esclaves menée par Toussaint Louverture. 1794 abolition de l’esclavage par la Convention 1801 Constitution promulguée par Toussaint Louverture. Janvier 1802 expédition lancée par Bonaparte, juin 1802 reddition de Toussaint Louverture. 1804 Dessalines poursuit la révolte et proclame l’indépendance  de la république d’Haïti. La situation politique ne cessera d’être instable. Les Etats-Unis exercent une pression politique permanente et forte dans le pays. 1958-1986: dictature sanglante de la famille Duvalier. 1958-1971: François Duvalier « Papa Doc » installe la dictature appuyé par les  milices des « Volontaires de la Sécurité Nationale » surnommés les « Tonton macoutes ».    1971-1986  Jean-Claude Duvalier « Baby Doc » renversé par une insurrection il se réfugie en France. Haïti revient à une république marquée par une forte instabilité politique

A LIRE

 Etzer Charles, Gérard Azoulay, Jean-Claude Dillon, Le pouvoir politique en Haïti de 1957 à nos jours, Karthala, 1994, pp.168-172

 

ELECTIONS PRESIDENTIELLES 2010

© Olivier Laban-Mattei- Polaris, décembre, 2010

Martelly’s supporters demonstrate, in the streets of Port-au-Prince, to protest against the results of the presidential elections and the defeat of their leader, Michel Martelly.

/// A Martelly’s supporter throws a stone against Minstah’s tanks, in a street of Port-au-Prince.

Haïti: 09/10/2010 violences suite  aux résultats du premier tour de la présidentielle, 4 morts (source le monde.fr)

Quatre personnes ont été tuées, mercredi 8 décembre, en Haïti et plusieurs blessées lors des manifestations violentes qui ont eu lieu après la proclamation des résultats du premier tour de la présidentielle. Le maire de la localité côtière a indiqué que deux personnes ont été tuées par des casques bleus de l’ONU alors qu’elles tentaient d’incendier un bureau de vote. La presse locale a fait état d’un autre mort lors de manifestations à Cap-Haïtien dans le Nord. Des bureaux de la direction générale des douanes, des impôts, du ministère des finances et du parquet, ainsi qu’une antenne du Conseil électoral provisoire ont été détruits.

Violences à la suites des résultats du premier tour des présidentielles 8/12/2010 (source le monde.fr)

L’ex-première dame, Mirlande Manigat et Jude Celestin, protégé du président sortant René Préval, s’affronteront au second tour de la présidentielle haïtienne, selon les résultats préliminaires fournis par la commission électorale. La première a recueilli 31,37 % des voix, le 28 novembre, et le second 22,48 %. La date du second tour a été provisoirement fixée au 16 janvier, mais elle doit être confirmée.  Le candidat Michel Martelly, capable de mobiliser des milliers de partisans a promis une vague de contestation s’il ne passait pas le premier tour, arrive en troisième position avec 21,84 %. Il accuse le chef de l’Etat sortant, son jeune protégé et leur coalition baptisée « Inite » (unité) de chercher à « voler l’élection » par la fraude et les manipulations au sein du Conseil électoral provisoire, l’instance officielle chargée d’annoncer ce mardi les résultats. Ses partisans ont érigé des barricades dans le quartier de Pétionville (…)  Des coups de feu ont retenti dans plusieurs quartiers de Port-au-Prince, et les radios haïtiennes ont rapporté des manifestations dans plusieurs villes du pays. Beaucoup craignent que la situation ne s’aggrave.


Liste et biographie des candidats à la présidentielle à consulter sur: http://www.haitielections2010.com/candidats.php A noter Jude Celestin est le candidat d’INITE parti du président Réné Préval. INITE a fait l’objet de tensions internes avec la candidature dissidente de J-E Alexis, ancien premier ministre, destitué en 2008 suite aux émeutes de la faim en Haïti. M. Martelly chanteur, reçoit un  important  soutien populaire.   Le 28 novembre 12 candidats appellent à l’annulation des élections, le 29 novembre  ce sont 15 candidats qui  appellent à l’annulation.

© Olivier Laban-Mattei- Polaris, novembre 2010 The presidential election in Haiti takes a bad way with fraud suspicions and troubles from some supporters in polling stations./// Michel Martelly (C), candidate for the presidential election, demonstrate with the singer Wyclef Jean (L) and Charles-Henry Becker, another candidate, 28 november 2010 in the streets of Port-au-Prince, with their supporters, to protest against the fraud during the vote and to ask for the cancellation of the poll.

Liste des candidats qui demandent l’annulation du scrutin

Charles Henri Baker « Regwoupman sitwayen pou espwa (Respè)» /Jean Henry Céant « Renmen Ayiti »/Joseph Michel Martelly « Repons peyizan » /Leslie Voltaire « Ansanm nou fò»/Jacques Edouard Alexis « Mobilisation pour le Progrès d’Haïti (MPH)»/Jeudy Wilson « Fòs 2010 »
Josette Bijou (Indépendante)/Erick Smarcki Charles « Parti de l’Évolution nationale d’Haïti (PENH) »/Jean Chavannes Jeune « Alliance Chrétienne Citoyenne pour la Reconstruction d’Haïti (ACCRHA) »/Garaudy Laguerre « (WOZO) »/Leon Jeune « Konbit liberasyon ekonomik (KLE) »/Mirlande Hyppolite Manigat « Rassemblement des démocrates nationaux progressistes (RDNP) »/Génard Joseph (Groupement Solidarité), arrivé au moment de la déclaration d’annulation du scrutin, a approuvé la position des 12. Après cette conférence, Yves Cristalin « Oganizasyon Lavni (LAVNI) » et Yvon Neptune « Ayisyen pou Ayiti » se sont exprimés en faveur de l’annulation du scrutin.
Ceci porte à 15 sur 18 le nombre de candidats à la présidence exigeant l’annulation du scrutin du dimanche 28 novembre.
Le sénateur Jean Hector Anacacis « Mouvement Démocratique de la Jeunesse Haïtienne (MODEJHA)» n’a pas pris position en faveur de l’annulation, il a seulement qualifié « d’échec » le scrutin de dimanche. La position du candidat Gérard Marie Necker Blot « Platfòm 16 Désanm » n’est pas encore connue. Axan Abellard « Konbit nasyonal pou devlopman Ayiti (KNDA) » avait jeté l’éponge de la course une semaine avant le scrutin. Quant au candidat du pouvoir, Jude Célestin « INITE » il a déclaré (loin de ce meeting) que les élections se sont « déroulé normalement ».

A consulter

http://www.haitielections2010.com/candidats.php

http://www.haitilibre.com
http://www.haitilibre.com/article-1709-haiti-elections-axan-abellard-jette-l-eponge.html
http://www.haitilibre.com/article-1778-haiti-elections-12-candidats-reclament-l-annulation-des-elections.html
http://www.haitilibre.com/article-1774-haiti-elections-mirlande-manigat-demande-l-annulation-des-elections.html
Rappel : Transparency International classait Haïti en 155e position dans son étude sur les pays les plus corrompus du monde… sur 159 pays.

LA CITE SOLEIL
Bidonville situé à la périphérie de Port-au-Prince,  250 000 personnes (est 2009) vivent à Cité-Soleil, la plupart dans une misère totale. La Cité Soleil a été fondée dans les années 1960 par François Duvalier et portait à l’origine le nom de Cité Simone, en référence à son épouse Simone Ovide. Le 20 février 2007, la  MINUSTAH déclare avoir pris le contrôle de Cité Soleil tandis que deux casques bleus sont morts lors d’une fusillade la semaine précédente, alors qu’ils étaient 700 à avoir bloqué le bidonville.
Le 25  mai 2010 les autorités policières (PNH) informent qu’un enfant de 9 ans a été tué par balles, samedi dernier, lors d’un affrontement entre 2 groupes armés de Cité Soleil (Linteau 2 et Ti Haïti). La cause de l’affrontement entre les deux gangs rivaux reste inconnu. Le calme est revenu dimanche à Cité Soleil après le déploiement de la PNH et de l’UNpol. Le 28 octobre 2010 le premier cas de choléra est recensé à la cité Soleil

MILICES, GANGS ET VIOLENCE

Tonton Macoutes
Membres des milices  crées en  1958 et au service de la protection du président François Duvalier puis Jean-Claude Duvalier. Ce nom correspond à un personnage du folklore haïtien équivalent au croque-mitaine oui au Père Fouettard. Ces milices extrêmement violentes se sont rendues coupables d’exactions terribles contre les civils (viols, torture, massacres, extorsion, trafics…). Le macoutisme est assimilé à un terrorisme institutionnel.

Les Chimères
Membres de milices soutenant l’ancien président Jean- Bertrand Aristide et qi ont semé la terreur entre 2001 et 2005 Rebaptisés les « Rats pa kaka« , les irréductibles de l’ancien régime occupent le « béton ». Et poursuivent leurs exactions (fusillades, exécutions sommaires). Leurs bastions sont les quartiers de La Saline, Bel-Air, Cité-Soleil.

A VOIR,A LIRE
Ghosts of the Cité Soleil, Documentaire

Le Figaro, Les Chimères entretiennent un climat de terreur à Port-au-Prince 21 décembre 2004

MINUSTAH

Après le séisme dévastateur qui a frappé Haïti le 12 Janvier 2010, le Conseil a augmenté les niveaux de forces globaux de la MINUSTAH pour appuyer le rétablissement immédiat, de reconstruction et de stabilité ainsi qu’à soutenir les efforts. Le Conseil a encouragé la MINUSTAH de fournir un soutien logistique et l’expertise technique pour aider le Gouvernement d’Haïti de poursuivre ses. Il a demandé à la Mission de continuer son soutien au Gouvernement haïtien et le Conseil électoral provisoire dans la préparation et la conduite des élections en Haïti, et de coordonner l’assistance électorale internationale en Haïti, en coopération avec d’autres acteurs internationaux, y compris l’OEA.

Mission:

Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH)
Quartier Général:Port-au-Prince
Effectifs 7.803 militaires et 2.136 policiers UNPOL, 464 civils internationaux, 1.239 civils locaux et 207 volontaires des Nations Unies (VNU).
Militaires : 19 nationalités
UNPOL : 41 nationalités
Civils : 115 nationalités
Le 13 octobre 2009, par sa résolution 1840, le Conseil de sécurité a décidé que la MINUSTAH comportera à titre temporaire, un contingent d’un maximum de 6.940 soldats de tous rangs et une composante policière de 2.211 membres maximum.
Pays fournissant des effectifs militaires:Argentine (557), Bolivie (208), Brésil (1.280), Canada (5), Chili (509), Equateur (67), États-Unis d’Amérique (6), France (2), Guatemala (116), Indie (1), Jordanie (634), Korea (1), Népal (1.078), Paraguay (31), Pérou (209), Philippines (157), Sri Lanka (959) et Uruguay (1.136).
Pays fournissant des agents de police civile :Argentine, Bangladesh, Benin, Brésil, Burkina Faso, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Colombie, Côte d’Ivoire, Croatie, Egypte, El Salvador, Espagne, Etats-Unis d’Amérique, France, Grenade, Guinée, Inde, Jamaica, Jordanie, Madagascar, Mali, Népal, Niger, Nigeria, Pakistan, Philippines, République Centre Africaine, Roumanie, Ruanda, Russie, Sénégal, Serbie, Sri Lanka, Tchad, Togo, Turquie, Uruguay, Yémen
Budget de la mission :Pour la période du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010 : 611,751,200$, financés par l’ensemble des Etats membres des Nations Unies proportionnellement à leurs moyens (par exemple la contribution d’Haïti au budget annuel est de : 0,2%,  soit 1,200,000 $).

Pertes en vie humaines :– 63 militaires- 25 agents de police de l’ONU (incluant les FPU)- 43 civils (internationaux)-24 civils (locaux)

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